
TOULOUSE LAZARE BROUSSE

MOISSAC, UN MIRACLE OUBLIÉ
Dès 1938, lors de l’alerte de Munich, R. Gamzon conçoit un plan d’évacuation vers le Sud-Ouest ; où les eif implantent, en septembre 1939, un réseau de six maisons d’enfants : à Beaulieu-sur- Dordogne (Corrèze), La Ruffie et Saint-Céré (Lot), Saint-Affrique et Villefranche-de- Rouergue (Aveyron), Moissac (Tarn-et- Garonne).
La Maison des enfants de Moissac, créée à l'initiative de Robert Gamzon et située sur la commune de Moissac en Tarn-et-Garonne au 18, quai du port.
La Maison de Moissac était dirigée par Shatta et Bouli Simon, un couple d'éclaireurs israélites de France.
Elle habrita de 1939 à 1944 de nombreux enfants et fut le siège des E.I.F de toute la région Toulousaine.
Environ 500 enfants de deux ans à dix-huit ans ont séjourné à la Maison de Moissac, quelques jours pour certains, plusieurs années pour d’autres. Tous ont échappé à la déportation, à l’exception d’un seul, repris par ses parents et déporté avec eux.
Elle maintient la discipline scoute.
La bas, on apprend aux enfants et aux adolescents à se débrouiller en cas de besoin — question de survie.
Cette discipline aidera les pensionnaires de la Maison lorsque viendra l’heure de la dispersion et de la clandestinité, fin 1943.
A la Maison de Moissac, le judaïsme subit l’influence de Léo Cohn et d’Isaac Pougatch.
C’est un judaïsme joyeux, festif, optimiste et hassidique, qui se fait particulièrement sentir
à l’occasion du Shabbat. Le calendrier juif rythme la vie de la Maison.
Difficile de comprendre comment Shatta et Bouli Simon insufflèrent autant de joie et vie là
où rodait la mort.
La plupart des membres qui risquent à tout instant leur vie pour sauver des enfants ont à
peine vingt ans. La Sixième étoffe ses activités clandestines.
A la Maison de Moissac, on se met à fabriquer de faux papiers en mettant en œuvre des
techniques toujours plus affinées.
A Moissac, un secrétaire de mairie, Manuel Darrac, apporte son aide ; il sera reconnu «Juste parmi les Nations».
L’atelier de faux papiers de la Maison fournit la région de la Sixième Division Toulouse.
A partir d’août 1942, tous les enfants et responsables de la Maison de Moissac sont directement menacés.
En novembre 1943, le danger est tel que les responsables décident la dissolution de la Maison : les enfants vont vivre dispersés et sous une fausse identité.
Les cadres E.I.F. de la Maison de Moissac parcourent la région qui leur a été assignée afin de régler des pensions, apporter tickets d’approvisionnement, matériel scolaire, habillement, réconforter des enfants livrés à eux-mêmes et les aider à maintenir vivace le lien avec le judaïsme tout en veillant au risque de conversion.
Début 1944, l’étau s’est resserré, les contacts entre les cadres E.I.F. deviennent toujours plus risqués.
Les attentats contre les voies de chemin de fer, rendent les déplacements de plus en plus tortueux. Le S.T.O. menace les garçons.
Les filles prennent le relai et se chargent des visites aux enfants.
Fin 1943 – début 1944, tous les enfants sont cachés sous de fausses identités.
De nombreux chefs scouts ont pris le maquis au sein d’un groupe qui se constituera en «Compagnie Marc Haguenau».
Mars 1944, considérant la gravité de la situation, Robert Gamzon, dit Castor soucieux (créateur et commissaire général des E.I.F pendant la guerre) décide de dissoudre tous les chantiers ruraux et toutes les unités scoutes qui se réunissent encore dans les villes.
D’autres mesures sont prises. Robert Gamzon envoie par ailleurs un message aux troupes scoutes dans lequel il invite chaque membre à choisir sans tarder entre trois formes d’engagement : rejoindre le maquis juif ; s’inscrire à la Sixième afin d’œuvrer au sauvetage des enfants ; émigrer en Palestine afin de participer à l’édification du Foyer national juif.
Dix habitants de Moissac sont honorés comme Justes parmi les Nations : Manuel Darrac, Henriette Ducom, Jean Gainard, Alice Pelous, Alida Bourel, Henri Bourel, Pierre Bourel, Renée Bourel, Albini Ginisty et Ernestine Ginisty.
L'association Ville de Justes oubliée œuvre à garder la mémoire de la maison des enfants juifs de Moissac.


